Le cellulaire

 

— Je le trouve vulgaire : surtout au restaurant.

 

Comment ne pas être d’accord ? Surtout dans la rue, ajouterais-je, où  vous tombez sur des affairés aveugles, une bite noire et aplatie entre bouche et oreille, sur des notables aux gestes péremptoires et aux ordres faciles, éternellement vides; sur des demoiselles à frou-frou singeant un chef encore trop vert; sur de sempiternels jeunes, sourire ouvert sur un doux rien. Il est difficile de nier que le cellulaire a rendu lourde une terre qui l’était déjà trop, qu’il a rendu la main et le discours maîtres d’une pensée toujours plus esclave. Et alors ?

 

            Si la bite, noire et aplatie, devient blanche et cylindrique, on peut appliquer notre tirade aux fumeurs. Pourquoi suis-je viscéralement contre le cellulaire et viscéralement pour la fumée, même si je ne fume pas et n’ai jamais fumé ? Fumer dans la rue a déjà été considéré comme vulgaire. Maintenant c’est moralement acceptable (économiquement et socialement toujours moins). Est-ce parce qu’on s’habitue à tout ?

 

            Non, on ne peut pas comparer les deux phénomènes : dans un cas les putes ouvrirent le chemin aux femmes comme il faut et aux gamins, dans l'autre les hommes d’affaire ouvrent le chemin aux putes.

 

            Trop simple ?