Refus tacite
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on veut dire non. Il n’y a
pas de troisième option[1] . Je n’aime pas cette phrase fasciste jusqu'en ses plus courtes
voyelles. Et pas parce que je pense qu’une femme qui dit « non » aux
avances sexuelles veut dire « oui ». Je suis d’accord avec Bonnie Diamond
de l’association nationale de la femme et du droit lorsqu’elle dit que :
« L’agression sexuelle est un crime très grave, pour lequel les gens sont
toujours prêts à trouver des excuses ». Je suis beaucoup moins d’accord
quand elle termine avec : « c’est très important que la question du
consentement soit très claire. ». Cette clarté dont ils sentent toujours
plus le besoin, s’apparente trop au « Non veut dire non ».
Tous ces besoins de clarté me donnent des boutons. Il y a très peu de
choses claires, et surtout pas d’événements clairs : le
« contexte » brouille toujours les pistes. Et c’est bien qu’il les
brouille car il nous oblige ainsi à allumer les phares de l’intelligence qui,
dans la crise de paresse actuelle, sont trop souvent éteints. Même si le
contexte devient un foyer d’excuses, il est nécessaire. Il est nécessaire pour
chercher un peu plus loin et pouvoir ainsi défaire les nœuds qui rendent
souvent la vie stupidement difficile.
Que le « non » ait déjà été interprété comme un « oui »
n’est pas une simple ruse d’hommes en rut : il fut une période dans
laquelle les femmes devaient dire « non » et être
« forcée » au « oui », pour garder le mythe masculin de la
femme chaste et pudique. Cette période est révolue, et il s'agit donc juste de
donner un autre poids au « non ».
Un autre poids.
Mais, plutôt que de lutter contre le consentement
tacite, j’aimerais mieux être partisan du refus tacite : c’est à dire du fait que quand la femme se tait
elle dit « non ». La femme doit donc dire « Oui » et
« Oui veut dire oui ». Le refus tacite met l’accent du côté de
l’affirmation et non de la résistance.
« Oui veut dire oui »,
c’est clair, c’est affirmatif, c’est fort, c’est la vie.
Et puis j’ai un autre motif, plus profond et plus vivant, plus chatouillant
et plus malade, pour vouloir contextualiser le « non » : toutes
les femmes que j’ai connues — très peu nombreuses, malheureusement — dans les
moments de plus grande excitation alternaient souvent des « Oh
oui ! » avec des « Oh nooon ! ».
Que faire de ce nooon qui vient
après un oui ? J’ai toujours
interprété ce « nooon » comme une invitation à continuer. Me suis-je
trompé ? Si oui, je suis vraiment plus con que je ne le pensais.
[1]. Déclaration du professeur Irwin Cutler citée par Marie-Claude Ducas, « Finie la notion de consentement tacite », Le Devoir, 2 mars 1999.