Après avoir lu deux guets-apens (Emerson et Pannonius),
je me dis qu’il fallait absolument que je lise au moins un des deux essais
humoristiques d’Allegro ma non troppo : Les lois fondamentales
de la stupidité humaine, de Carlo Cipolla, publié en 1992 par l’éditeur
Balland: je lis en premier Les lois fondamentales de la stupidité humaine.
Je respire. Après la lecture de cet essai plein d’humour et avec quelques
touches d’ironie, j’étais réconcilié avec les éditeurs : « Faites de
l’argent, enrichissez-vous mais donnez-nous des livres
intelligents ! ». L’auteur nous propose cinq lois fondamentales de la
stupidité. Je ne vous donnerais que la première : « Toujours et
inévitablement, chacun d’entre nous sous-estime la quantité d’individus
stupides en circulation », et la dernière : « les gens stupides
sont les personnes les plus dangereuses qui soient ». Pour avoir les
autres, allez acheter le livre et enrichissez l’éditeur ! De manière très
brillante Cipolla nous démontre les lois fondamentales non sans avoir défini la
personne stupide : « Une personne stupide est quelqu’un qui fait du
tort à un autre sans en tirer aucun avantage pour elle-même, voire qui subit en
conséquence une perte ». Il nous met aussi en garde contre le danger de
confondre une personne stupide avec une personne naïve (personne qui fait du
tort à elle-même en donnant des avantages aux autres) ou un bandit (personne
qui fait son intérêt et fait du mal aux autres). Il est clairement impossible
de confondre le stupide avec l’intelligent (celui qui procure des avantages à
lui-même et aux autres). Avec son approche scientifico-humoristique, Cipolla
nous démontre que la distribution de la stupidité est indépendante de la
culture, du sexe, de la couleur de la peau, la propreté du prépuce ou des
dents, en d’autres mots, elle n’a rien de culturel. S’il y avait un gène de la
stupidité, il serait certainement distribué complètement au hasard (nos hommes
politiques, par exemple, ne sont, en moyenne pas plus stupides que leurs
sujets, par contre ils peuvent être
beaucoup plus bandits). J’ai assumé la tâche impossible de décrire un
livre plein d’humour et j’ai oublié qu’on ne peut que l’aplatir — quand il est
vraiment plein d’humour. Je réitère donc l’invitation à le lire. L’autre essai
est intitulé « Du rôle des épices (et du poivre en particulier) dans
le développement économique du moyen âge. ». Moins brillant que celui sur
la stupidité, mais amusant.